Quasiment inconnu en France, mais régulièrement cité dans l’ésotérisme anglo-saxon, Gerald Massey appartient à ces mythographes fantaisistes du 19e siècle dont les théories semblent plutôt s’être exhalées d’une pipe d’opium que de fouilles archéologique. A sa décharge, il faut dire qu’à l’époque, l’histoire en tant que discipline scientifique n’est pas encore proprement constituée et que Massey est loin d’être le seul dans ce cas.
S’il ne se trouve plus grand monde aujourd’hui pour le prendre au sérieux, il existe cependant un certain intérêt à se pencher sur son œuvre, car elle constitue un ferment important pour l’imaginaire de plusieurs auteurs modernes, spécialement pour Kenneth Grant qui y piocha, entre autres, le terme devenu fameux de « typhonien ».
Né le 29 mai 1828 dans la petite ville de Tring, au nord-ouest de Londres, Gerald Massey grandit dans une famille défavorisée. Contraint d’aller, très jeune, travailler à l’usine, il se venge en écrivant de la poésie. A l’âge de 22 ans, il publie son premier recueil, Voices of Freedom and Lyrics of Love (1850). Suivront divers essais et d’autres recueils finalement réunis dans un double volume My Lyrical Life, paru en 1889.
Au tournant de la quarantaine, Massey se passionne pour l’égyptologie. Il se met à hanter les sections du British Museum dédiées à l’Assyrie et l’Egypte et se lance dans un comparatisme entre la mythologie égyptienne antique et les récits évangéliques. Il pense y découvrir des similitudes et finalement en déduit que tout, absolument tout, y compris les habitants des îles Britanniques, vient d’Egypte.
Le résultat de ses recherches sera publié en 1881, dans The Book of the Beginnings, suivi par The Natural Genesis (1883), puis par Ancient Egypt : The Light of the World, paru peu avant son décès, qui a lieu le 29 octobre 1907.
La postérité retiendra son parallèle maladroit faisant d’Horus le précurseur du Christ, régulièrement recyclé par les adeptes du complot et dont certains auteurs modernes (comme Alvin Boyd Kuhn, Tom Harpur ou Dorothy M. Murdock) choisiront contre toute logique de s’inspirer, tandis que les universitaires garderont surtout en tête le nombre d’erreurs historiques commises par Massey, dont les thèses furent à juste titre qualifiées d’« absurdités marginales ».
Ainsi, contrairement à ce qui est affirmé dans The Natural Genesis, il n’est écrit nulle part que la déesse Isis ait été vierge ; aucun texte égyptien ne mentionne qu’Horus avait 12 disciples ; Horus n’est pas mort et ressuscité au bout de trois jours, etc., etc.
De notre côté, nous retiendrons le dualisme Horus / Typhon et l’avalanche syncrétiste qui en découle. Pourquoi voudrait-on faire une chose pareille ? Me direz-vous. Eh bien, parce que les lecteurs de Kenneth Grant et des auteurs qui se sont enfilés dans ses traces, y entendront une ritournelle familière.
Nous publierons au fur et à mesure de sa traduction, la section 6 de The Natural Genesis, intitulée « La Genèse Naturelle et la typologie du Serpent Mythique ou Dragon et autres Elémentaires » qui compte 70 pages. Les fans des bébêtes qui ondulent, qui ont des yeux rouges ou qui éternuent du feu pourront dès lors m’élever une statue.
Merci de ne pas aborder ou faire circuler ces textes comme s’ils constituaient des documents historiques fiables et de les considérer comme il convient, à savoir la source de mythes ésotériques contemporains.
Melmothia, 2015.