« De la flûte des deux cuisses monte mon chant, et de ma luxure s’ouvrent les fleuves. Comment pourrait-il ne pas y avoir de déluge, à chaque fois qu’entre mes lèvres verticales brille un sourire ? »
Le retour de Lilith, Joumana Haddad, 2011.
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L’ouvrage Lilith Reine des Sorcières, Pratiques et dévotions dans la tradition de la Wicca occidentale, par Athénos Orphée vient de sortir aux éditions Danaé (Alliance Magique), en mai 2018. Voici, en exclusivité, un rituel extrait de ce livre :
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Le souper de Lilith
Ce rituel est particulier. Tout comme le Deipnon ou le Noumenia sont des rituels spécifiques à la Déesse Hécate, le rite de la lune noire, célèbre les mystères de Lilith et plonge l’initié dans l’égrégore propre à la Déesse.
Il sera célébré à la nouvelle lune, au coucher du soleil ou à l’heure la plus proche de minuit. La Lune Noire est le portier entre le monde éveillé et la terre riche et fertile de la transformation intérieure. Elle tient la clé des mystères de l’âme. Traversant la surface de l’existence superficielle, la Lune Sombre réveille notre joie pour la vie, notre nature sensuelle et notre magie la plus inspirée. Répondre à l’appel de l’ombre renforce notre ténacité, nous libère de toutes les souillures et des traumatismes du passé, libère notre puissance. Nous nous révélons plus grands et plus brillants dans le monde, tandis que nous apprenons à exprimer notre moi le plus mystique.
Un bain spécifique devra être pris. Il ne s’agira pas, bien entendu, de vous laver des souillures de la journée, mais de vous préparer spirituellement au rite que vous allez célébrer.
Pour se faire, une heure avant le rituel, prenez un grand saladier d’eau lustrale chaude où vous déposerez des herbes symboliquement liées au feu telles que coriandre, gingembre, menthe poivrée, sarriette, cannelle, clous de girofle, etc., suivant ce dont vous disposez, ainsi qu’une cuillère à soupe de miel de bonne qualité.
Mélangez avec vos mains quelques instants cette mixture, en vous concentrant sur son rôle et son importance dans la préparation du rite à venir, et terminez en « dessinant » avec votre index sur l’eau le symbole de Lilith : le triangle surmonté du trident. Il ne suffit pas de le tracer bêtement, vous devez charger votre eau par ce symbole que vous visualiserez en flammes.
Puis, placez dans le mélange, au milieu du saladier, une bougie allumée de couleur rouge. Pour des raisons pratiques, je vous conseille une neuvaine de cire rouge dans un contenant en verre de même couleur, que vous aurez préparée par avance en y traçant le sceau de Lilith et en y versant un peu d’huile de Lilith. Vous pourrez la conserver pour des bains ultérieurs.
Laissez le saladier de côté, le temps de mettre en place les éléments destinés à votre rituel. Une fois votre matériel en place, prenez une douche en vous lavant comme vous en avez l’habitude, puis versez sur votre corps le mélange. Vous devez ressentir les bienfaits de cette eau, qui vous charge en magie, qui fait de vous un être libre, un être à part, loin du commun des mortels, rayonnant de sensualité, magnifique, chaud comme la braise, irradiant de beauté, celle de ces hommes ou femmes que l’on envie pour leur magnétisme et le désir qu’ils inspirent, non parce que leur corps sont parfaits, mais parce qu’ils émanent un « je ne sais quoi » que les autres n’ont pas. Sentez-vous provocatrice et sensuelle, sentez-vous sorcière…
Une fois cela effectué, laissez l’eau sécher naturellement sur votre corps et préparez votre visage et vos cheveux comme pour un rendez-vous galant. Vous êtes un représentant de Lilith, la séduction est votre seconde nature. Mesdames, maquillez votre bouche d’un rouge provocateur, coiffez-vous comme vous aimez, portez vos bijoux préférés, les plus brillants et tape-à-l’œil et n’oubliez pas de porter votre jarretière de Lilith. Messieurs, apprêtez-vous et parfumez-vous comme pour séduire votre belle et si vous désirez vous maquiller, faites-le !
Ce rite peut se pratiquer nu, mais vous pouvez également vous habiller en rouge.
Avant le rituel, vous aurez confectionné un gâteau triangulaire qui aura la forme d’une vulve stylisée, peu importe les ingrédients que vous choisirez, mais essayez de privilégier ce que Lilith apprécie, les saveurs sucrées et miellées.
Concernant le vin utilisé durant le rite, vous pouvez suivre une recette traditionnelle de vin sorcier, dont voici un exemple venant du site Les portes du Sidh(http://www.le-sidh.org; cette recette est excellente, tout comme l’ensemble de leur site que je vous invite vivement à visiter :
« Il te faudra deux bouteilles d’un bon vin rouge tannique. Tu peux choisir un Bordeaux ou un Cahors par exemple. Verse ce vin dans un grand récipient, et laisses-y macérer pendant une nuit (pas plus de 13 heures) tous les ingrédients suivants :
- Deux belles oranges, coupées en deux, que tu devras piquer au préalable de clous de girofle.
- Trente grammes de racine de gingembre frais
- Dix grammes de coriandre en graines
- Dix grammes de cannelle en bâton
- Dix grammes de cardamome blanche
- Cinq grammes d’origan
- Un petit piment fendu (type pili-pili)
- Dix cuillères à soupe de miel (plus ou moins selon tes goûts)
- Dix cuillères à soupe de cassonade (plus ou moins selon tes goûts)
- Dix cuillères à soupe de cognac
- Et un minuscule morceau de racine de mandragore. Mais, c’est facultatif.
Passée la nuit (ou les 13 heures) de macération, il te faudra filtrer, puis mettre en bouteille. »
Le rite :
Allumez les chandelles et l’encens sur l’autel, levez les bras vers le ciel, et dites :
« Je t’appelle ô ma Déesse en cette heure de ténèbres, où ta face se recouvre du voile de l’obscurité, regarde-moi (votre nom) qui suis ton/ta prêtre/prêtresse au-delà du temps et de l’espace, car ici, au centre de l’étoile brillante de mon être je t’invoque. J’entre dans le Royaume de la Lune Sombre avec respect, je visite le jardin des fragments d’âmes perdues, cherchant des os rejetés par choix ou par la force, tout au long de ma vie.
Marag Ama Lilith Rimog Samalo Naamah !
Par le pouvoir des puits sombres de la terre, je t’appelle toi ma Déesse Écarlate, Lilith entends-moi, qui célèbre ton culte.
Du repaire du Serpent dans les eaux de rubis, je t’appelle, Mère des sorcières et Reine des délices interdits ! Viens, et que ta magie opère !
Des montagnes et des collines où brûlent les feux du sabbat, je t’appelle, Déesse du croissant obscur, Mère de la sagesse noire, viens enserre-moi dans les bras de la renaissance et la régénération se fera, que ta magie opère !
Des cieux noirs de la nuit, je t’appelle Mère des dragons, Souffle brûlant, qui crie sa liberté à la face du désert. Viens, et que ta magie opère !
Marag ! Ama ! Lilith ! Rimog ! Samalo ! Naamah ! Écoute mon appel, viens en ce temple de chair m’investir de ton pouvoir et m’apporter tes saines bénédictions. »
Prenez votre calice rempli de vin, levez-le face à l’autel, et dites :
« Je te conjure ô vin, toi qui le premier, sortis du sein de la lumière de la lune et du soleil, toi, le sang de la terre, jailli de la grappe gonflée et mûre. Ô Vin, reçois la bénédiction de Lilith, toujours présente dans ces fêtes où nous l’invoquons, deviens sang de la Déesse et qu’à travers toi, nous recevions la force des Dieux et de tout ce qui est sauvage et libre. »
Buvez-en un peu et versez le reste dans le bol d’offrande en disant :
« Ô Lilith tu es en moi, nous ne formons plus qu’un seul être. Et nous scellons par lui notre union divine. »
Prenez le gâteau, passez-le trois fois dans la fumée de l’encens, mangez-en un bout et déposez-le dans le bol d’offrande.
Prenez la position de l’étoile (jambes et mains écartées) et déclamez la charge de Lilith :
« Je suis la fille/fils de la Fortitude et je suis ravitaillé à chaque heure de ma jeunesse. Je suis la sorcière qu’ils craignent tant. Ils me convoitent et me désirent avec un appétit infini, car aucun qui n’a été terrestre ne m’a embrassée, Moi Lilith, car je suis l’ombre du cercle des étoiles, couverte des nuages du matin. Mes pieds sont plus rapides que les vents, et mes mains sont plus douces que la rosée. Mes vêtements sont l’écarlate qui se répand du début à la fin de la vie, et ma demeure est en Moi-même. Entends-moi, enfant, et sache qui je suis. Je suis à côté de toi depuis le jour où tu es né, et je serai à côté de toi à l’extinction finale de ta lumière. Je suis la Passionnée, qui inspire au poète le rêve du futur. Je suis la Magicienne sauvage, la Sorcière qui ne peut être soumise, la Tisseuse de la danse, la Maîtresse des croisements, Celle qui enseigne les mystères et qui garde les secrets.
Le Lion ne sait pas où je marche, et les bêtes du champ ne me comprennent pas. Je suis déflorée, pourtant vierge, je sanctifie et je ne suis pas sanctifiée. Heureux celui qui me connaît : car dans la saison de nuit je suis douce et au jour, pleine de plaisir. Je suis le velours sombre de la nuit, les volutes brumeuses de minuit, enveloppée de mystère. Ma compagnie est une harmonie de nombreux symboles, et mes lèvres plus douces que la vie elle-même. Je suis une prostituée pour me ravir et une vierge qui ne me connaît pas. Purgez vos rues, ô fils des hommes, lavez vos maisons de toute souillure, rendez-vous saints et vénérez mon nom. Élevez vos vieilles croyances, et calcinez-les sur l’autel de ma victoire, alors je vous apporterai des enfants, et ils seront les fils de l’âge à venir. Je suis la chrysalide dans laquelle tu affrontes ce qui te terrifie, et de laquelle tu émerges, vibrant et renouvelé.
Cherche-moi aux carrefours et tu seras transformé ! Emporte mon amour en ton cœur et trouve en toi le pouvoir de devenir ce que tu dois être. »
En prenant une profonde inspiration, visualisez votre corps tout entier baigné d’une lumière rouge écarlate, un halo de puissance brute qui l’entoure d’un bouclier de lumière. Sentez les éventuels miasmes négatifs s’écouler hors de vous pour se répandre dans la terre qui les enfouit dans ses entrailles. Sentez chaque parcelle de votre corps emplie de cette nouvelle énergie.
Cessez toute visualisation. Méditez quelques instants sur le rite et les sensations qui ont parcouru votre corps, et faites le vide dans votre esprit pour recevoir un éventuel message divin.
Pour clore ce rite, croisez les mains sur votre poitrine un peu à la manière égyptienne, et dites :
« Ô ma mère, sois bénie pour ta présence, je te rends grâce de la force que tu m’as donnée. Je te rends grâce de ta puissance ô Lilith. Cette maison, ce lieu, sont les tiens, fais-moi la grâce d’y demeurer et d’y bénir ceux qui y habitent. Toujours sous ta sainte protection, je clos ce rite. Évohé Lilith, évohé Lilith, évohé Lilith. »
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Lilith : Reine des Sorcières, Athénos Orphée, Danaé, 2018.
Loin des préjugés véhiculés par le judéo-christianisme et grâce à sa longue fréquentation de la déesse, Athénos nous présente aujourd’hui Lilith telle qu’elle se montre à ses adeptes, et non le reflet déformé d’une icône qu’on imagine lascive, qu’on craint néfaste, trop belle et trop venimeuse, éternel féminin castrateur, épouvantail ou égérie pour apprentis-sorciers en quête de sensations. À son habitude, l’auteur nous guide rapidement à l’essentiel : après une présentation concise mais érudite de la Reine des Sorcières, il nous enseigne les nombreuses manières de s’adresser à elle.
Autel dédié, prières et charmes sont autant d’outils pour influencer tous les aspects de notre vie. Qu’il s’agisse de protection, chance, divination, désenvoûtement, le lecteur apprendra à la fréquenter personnellement et à jouir de ses bénédictions.
Initié dès son plus jeune âge à la magie des campagnes, puis à différentes traditions Wicca et hoodoo, Athénos Orphée est aujourd’hui à la tête de son propre coven magique, dans la lignée de la Wicca Luciférienne. Désireux de faire reconnaître ces traditions comme d’authentiques voies initiatiques, il transmet, depuis plusieurs années, par le biais d’ouvrages, d’une chaîne YouTube et de cours, sa connaissance du monde sorcier.