La Goetia – La Petite Clé du Roi Salomon

Un grand merci à Marie-Véronique qui a nous a autorisés à reprendre sa critique de l’ouvrage La Goetia – Petite Clé du Roi Salomon, paru en février 2017 aux éditions Chronos Arenam. Ce texte est la traduction française, par Philippe Pissier, de la première partie du Lemegeton, précisément de l’édition, révisée et commentée, qui fut publiée en 1904 par Samuel Mathers et Aleister Crowley sous le titre The Goetia: The Lesser Key of Solomon the King.

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La Goetia – La Petite Clé du Roi Salomon

Ou encore de son petit nom, «Clavicula Salomonis Regis».

Les occultistes connaissent tous le «Clavicula Solomonis Rex», connu mondialement sous le nom de Lemegeton, dont une traduction complète en français existe. La Goetia est la toute première partie du grimoire, et probablement aussi la plus connue. Véritable manuel de Magie Evocatoire, il comporte un annuaire avec les coordonnées des 72 esprits à contacter suivant les besoins, et la marche à suivre pour les appeler !

Grimoire dont on ne connait pas le ou les auteur(s), compilé en anglais au XVIIe siècle, le Lemegeton a toujours véhiculé de grands phantasmes chez les petits magiciens du dimanche, et a certainement été la cause de nombreuses admissions en hôpital psychiatrique. Ici, Samuel Mathers en a traduit la première partie en anglais moderne, et Aleister Crowley l’a ensuite publié. Ces deux personnages, l’un fondateur de l’Ordre Hermétique de la Golden Dawn, et l’autre magiste très décrié, au zèle passionné évident, nous offrent là un livre doté de nombreux commentaires et explications, très utiles à celui qui voudra comprendre les bases de la magie évocatoire, et que le livre de Franz Bardon aurait laissé sur leur faim.

La traduction de Philippe Pissier, que nous pouvons honorer du titre de «Traducteur Officiel d’Aleister Crowley» est tout à fait réussie. En effet, le lecteur pourra retrouver le ton très subtil qu’utilisait Crowley, et on ressent alors les petites piques à l’attention de ses ex amis de la GD, Mathers en priorité, mais A.E. Waite en prend pour son grade lui aussi.

Deux introductions fort bienvenues

Dans les éditions de grimoires, il est toujours bienvenu de découvrir une introduction qui présente l’ouvrage, son contexte historique, et éventuellement des explications sur certaines parties du livre qui le nécessiteraient. Chez certains éditeurs, l’introduction est un véritable art, basé sur une recherche rigoureuse, qui amène une réelle valeur ajoutée au livre. En effet, quelle est l’intérêt de lire un ouvrage si le lecteur n’y comprend rien, s’il n’a pas les clefs ? Et puis, il y a d’autres éditeurs qui font le minimum et qui n’amènent rien de plus qu’une vague présentation d’un texte vieux de plusieurs siècles.

Heureusement ici, vu la complexité du sujet (je parle du livre bien sûr, même si Crowley est tout aussi complexe), l’introduction est bienvenue, et assez complète. La toute première, de l’éditeur et du traducteur, propose de remettre l’ouvrage dans son contexte de l’époque. D’où vient-il ? Que contient il ? Quelles en sont les différentes versions du manuscrit ? Quelles sont les éditions récentes ? Pour appuyer l’édition française ici présente et en comprendre la provenance.

Vient ensuite l’introduction fort intéressante d’Hymenaeus Beta, le dirigeant actuel de l’O.T.O. Il nous retrace l’histoire de la GD, de l’entrée de Crowley dans le Temple Isis-Urania, et les relations houleuses du magiste avec ses Frères. Viennent ensuite les «je t’aime, moi non plus !» entre Mathers, fondateur de l’Ordre, et Crowley passant du statut d’apprenti timide à celui d’occultiste caractériel. Nous en savons plus sur les recherches, et de Mathers, l’auteur, le traducteur des manuscrits en langue anglaise «moderne», et celles de Crowley, qui décida de les éditer en y ajoutant ses touches personnelles, ainsi que ses commentaires. D’ailleurs, cette introduction plaisante à lire, un peu comme un roman d’aventure, ne serait pas complète sans l’explication de la façon de penser d’Aleister Crowley, au début du 20e siècle, et les révolutions scientifiques en terme de psychologie notamment.

Nous en savons maintenant beaucoup plus sur l’état d’esprit de Crowley, sur celui de Mathers aussi, et nous pouvons commencer sereinement à lire La Goetia en elle-même.

La Goetia

Dès l’invocation en grec, le carré magique, et la note préliminaire, Aleister Crowley marque le territoire, et même s’il gratifie Mathers de son travail de traduction, il protège le livre d’attaques occultes qui pourraient venir de son auteur premier. D’ailleurs, Crowley informe derechef le lecteur que le Frater D.D.C.F. a «succombé aux Assauts des Quatre Grands Princes», bref, autant dire qu’il est devenu fou ! Ce qui peut nous indiquer que la pratique des techniques contenues dans ce livre, peuvent s’avérer dangereuses…

C’est la raison pour laquelle, Aleister Crowley a ajouté une Invocation Préliminaire. Celle-ci est fort intéressante, car elle s’appuie sur l’invocation d’un Ange Gardien, un peu à la manière de l’ascèse déjà vue dans la Magie Sacrée d’Abramelin le Mage, Ange Gardien qui protégera et conseillera l’opérateur sur les opérations magiques. Cette précaution forte utile, présente également dans les rituels de la Golden Dawn, permet de s’entourer d’un filet de sécurité pour la pratique, autant que d’augmenter son élévation spirituelle avec des appels au Divin. Crowley a élaboré cette invocation à partir d’un manuscrit en grec ancien, que vous retrouverez dans les annexes à la fin du livre : un très bon point.

Notons que le rituel est extrêmement bien annoté, pour permettre à l’occultiste de comprendre avec précision ce qu’il fait, et quelles sont les forces à qui il s’adresse.

Deux textes de Crowley sont insérés : «L’interprétation initiatique de la Magie Cérémonielle», et «Définition préliminaire de la Magie».

Dans le premier texte, il faut comprendre le contexte de l’époque, et la tentative un peu trop (à mon goût) psycho-matérialiste d’expliquer les phénomènes magiques. C’est une théorie assez en vogue qui peut s’avérer dangereuse, si la mise en pratique n’est pas accompagnée d’une Foi inébranlable, et d’une connaissance de la théorie des égrégores. Il me semble assez rapide de conclure que les forces mises en œuvre en magie cérémonielle proviennent essentiellement, voire exclusivement de l’opérateur et de sa psychée. Mais il ne s’agit là que de mon très humble avis, issu de ma propre pratique. Libre à chacun de suivre l’auteur sur ce terrain là, ou pas.
Quant à sa définition qu’il fait de la magie, elle est claire, même si le lecteur se fera son opinion, qui n’est pas la mienne non plus ? .

Le Shem Ha Mphorash

Voilà le nom de l’annuaire des 72 démons, anges déchus et esprits maléfiques. Un nom bien étrange, que les qabalistes ont plutôt l’habitude de voir dans un contexte associé aux 72 lettres du «Nom Ineffable de Dieu». Ici, nous avons sûrement «un jeu de mot» lié à la Voie de la Main Gauche, s’arrangeant avec certains concepts qabalistiques pour donner l’importance aux Anges Déchus, comme pour les Ruachoth appartenant à un Monde bien plus élevé. Est ce pour montrer la symétrie ? Sans doute.

Chaque esprit, est donc mentionné avec son nom, son sceau pour procéder à l’évocation, une représentation (très souvent) de Louis Breton et, et c’est plus rare, une représentation de Crowley lui-même. Bien entendu, une description de chaque esprit, de son rang, et de ses facultés est donnée. La partie de ce livre se termine avec des remarques, des précautions à prendre, notamment pour la confection des sceaux, en métal associé à la planète gouvernant l’esprit envisagé. Pour les chercheurs, un tableau fort utile nous donne les noms en alphabet hébraïque des noms des esprits.

Passons à la pratique !

Et la pratique commence par le cercle magique. Il est très célèbre, parce qu’on ne compte plus les livres qui le reprennent, sur le modèle original du Lemegeton et ses manuscrits ou le modèle de Crowley légèrement plus élaboré. Les lecteurs de Franz Bardon reconnaitront les parties à inclure dans son élaboration, et bien plus encore.

Ici, Aleister Crowley nous offre un cercle avec le Serpent enroulé autour du centre et de ses hexagrammes, ainsi que la traduction de ce qui est inscrit à l’intérieur de ce Serpent. Il est absolument fondamental, comme d’ailleurs insiste Bardon dans son «Magie Évocatoire», de connaître à la perfection tous les symboles utilisés pendant l’opération et leurs utilités, et nous sommes ici gâtés, car les descriptions sont solides.

Les triangles, hexagrammes et pentagrammes de protection sont examinés aussi, avec des illustrations bien visibles. Même le Sceau secret de Salomon est donné pour éventuellement sceller les esprits dans le vase d’airain.

Les autres outils sont aussi brièvement donnés. Brièvement, car dans ce grimoire, il n’est nulle question d’exorcisme ni de consécration des outils et autres pentacles. Chacun sait que dans la pratique évocatoire de la magie, les opérations préalables sont importantes et décrites dans la plupart des livres et grimoires. On pourra donc se reporter sur des consécrations précédées des exorcismes nécessaires dans d’autres ouvrages. Jules Boucher (JB) ou Ambelain sont, selon moi, parfaits. On retrouve aussi des procédures de consécration et une description beaucoup plus pointue des outils dans l’autre grimoire portant un nom similaire : le Clavicula Salomonis.

Faites votre choix.

Les conjurations

Voici les conjurations, dont la puissance va en augmentant. Chaque conjuration contient une explication à la fin de celle-ci, qui permet de savoir quoi faire en fonction du résultat.

La première, toute gentille, «La conjuration permettant d’évoquer n’importe lequel des esprits susdits»

Si l’esprit ne se présente pas derechef, il y a «la seconde conjuration».

Si l’esprit n’est pas d’humeur, il y a «la contrainte».

S’il ne se présente toujours pas, il faut en appeler à sa hiérarchie, avec «L’invocation du Roi». Et si ce dernier ne peut rien pour vous, c’est que la situation est bloquée. Il faut donc passer à «La malédiction générale dite «Chaine des Esprits contre tous les esprits rebelles»».

En dernier recours, c’est la «Conjuration du Feu» qu’il faudra utiliser. Il se peut qu’à ce moment là, l’esprit résiste toujours, alors il faut monter le ton, et utiliser «La grande malédiction».

Une fois devant vous, il faut s’assurer de son obéissance avec «l’Adresse à l’esprit pour sa venue», et ensuite lui souhaiter «La bienvenue à l’esprit».
Une fois le travail terminé, il faut lui permettre de partir avec «La permission de départ».

Ces conjurations sont intéressantes à lire, à travailler, pour comprendre ce qu’elles veulent dire, et comment elles s’articulent. Là aussi, il n’est pas question de lire une incantation sans comprendre comment elle fonctionne et à quels plans elle s’adresse.

Les conjurations sont également données en Hénochien, de manière phonétique, mais aussi en alphabet Hénochien. Les Initiés savent que la langue des Anges est d’une redoutable efficacité en magie cérémonielle, même si nous n’en avons pas toutes les clefs, les manuscrits de John Dee n’ayant pas tous été retrouvés.

Des annexes nombreuses et intéressantes

Nous avons de nombreuses annexes mises à la disposition du lecteur, comme des copies du livre annoté de Crowley, ou encore, un tableau du Liber 777 qui reprend les noms, y compris en hébreu, des esprits, leur appartenance dans les signes et décans zodiacaux, la planète associée ainsi que la lame du Tarot correspondante. D’autres surprises attendent le lecteur-chercheur qui en aura pour sa curiosité.

Un grimoire de plus ?

Il faut dire que j’ai accueilli cette édition avec joie. Je ne connais que mal Aleister Crowley, car sa façon de penser me dépasse largement, et c’est souvent avec difficulté que je déchiffre ce qu’il tente de faire comprendre.
Pourtant, dans l’élaboration de son ouvrage, avec le matériel de Samuel Mathers, il a voulu faire de ce premier livre issu du Lemegeton, un manuel clair et utilisable de la magie goétique, mais aussi et surtout de la magie évocatoire en général. Car, outre les esprits mentionnés, il est possible d’élargir les enseignements du manuel vers d’autres entités comme celles évoquées par Bardon.

C’est selon moi, un livre à posséder en complément des autres éditions complètes en français du Lemegeton – Calvicula Salomonis Rex, car il est intéressant en tous points de vue, notamment pour aborder le sujet si on ne le connait que peu.

Non seulement ses introductions sont éclairantes, mais en plus ses très nombreuses annotations de bas de page, et les textes préliminaires ainsi que les explications sur les noms utilisés sont précieux pour ceux qui découvrent l’art de la Goetie.

Comme le grimoire d’origine, le livre est richement illustré, et toutes les illustrations sont reprises dans une table en début de livre. Ce qui permet de retrouver aisément un sceau en cas de besoin.

La lecture est simple, on ne verse pas dans le langage hermétique qui donne envie de fermer le livre dès la deuxième page. Finalement, le but de Crowley, c’est de donner l’accès à tout le monde à ces anciens grimoires, au risque de mettre des outils dangereux dans les mains de n’importe qui. Car, même s’il nous apprend que la magie, c’est l’activation de forces intérieures, il n’en est pas moins que nous faisons appel à des énergies qui existent au sein d’un égrégore et dont la réaction peut être violente pour l’opérateur insuffisamment préparé.

Bref, je connais le Lemegeton, et j’ai eu l’occasion de procéder à des travaux liés aux esprits énumérés. Cette édition de la Goétia est riche, intéressante, bien écrite et bien traduite ? Un complément idéal au grimoire complet, une excellente entrée en matière.

Je la conseille donc à ceux qui aiment Crowley, à ceux qui débutent en Magie Cérémonielle (et qui ont malgré tout des connaissances et l’entraînement adéquat), et bien sûr, à ceux qui s’intéressent aux vieux grimoires sans toutefois les comprendre totalement.

Nous avons donc en français des éditions qui, par leur introduction, nous emmènent loin dans l’étude et la découverte, et ce livre est tout à fait adapté à ceux qui découvrent les anciens écrits, dépoussiérés par le Maîîîîtree ?

Le prix est modique, et pour seulement 19 euros, vous aurez chez vous un livre des plus célèbres pour la pratique de la magie cérémonielle. Une première entrée en matière expliquée par Aleister Crowley lui-même, qui vous donnera surement l’envie de vous procurer le version complète en français du grimoire toute aussi intéressante (Lemegeton – Sesheta Publications).

Une édition très bienvenue, absolument indispensable. A ce niveau, je ne vois même pas quel critique je pourrais faire. La traduction de Philippe Pissier est superbe, on apprend beaucoup, Crowley reste une référence en la matière, le matériel de départ est de grande qualité…

Il correspond à ce que l’on peut attendre d’un tel ouvrage. Ni plus, ni moins. Et pour le prix, la Tentation est grande !!

Il vous le faut ?

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Présentation de l’éditeur & lien de vente

La Goetia est LE grimoire par excellence.
Première partie du Lemegeton, traité anonyme de magie rituelle rédigé en anglais et datant du 17ème siècle (les principaux manuscrits se trouvent à la British Library de Londres), cet ouvrage décrit les 72 démons correspondant aux 72 quinaires astrologiques, ainsi que la procédure permettant de les évoquer.
Le célèbre mage britannique Aleister Crowley en livra une édition en 1904, dont ceci en est la première traduction française. La préface d’Hymenæus Beta, actuel dirigeant de l’OTO, fournit l’éclairage historique nécessaire pour correctement appréhender ce texte se devant de figurer dans la bibliothèque de tout étudiant sérieux des sciences occultes.
Cette édition incorpore les annotations manuscrites que Crowley effectua sur son exemplaire personnel, ainsi que sur celui de son disciple Gerald Yorke. Ont également été réunies les gravures de Louis Breton figurant dans la sixième édition du Dictionnaire Infernal de Collin de Plancy, celles donnant à voir les images magiques d’une partie des démons de la Goetia.
« La Tête d’Airain », rituel excessivement méconnu, mis au point par Crowley dans les années 20 et destiné à évoquer un certain Bélial, conclut cet ouvrage qui fera date dans le renouveau magique francophone de ce début du vingt-et-unième siècle.

Traduction Philippe Pissier

Format 15*21cm – N&B – 218 pages

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Visiter le site de Marie-Véronique : Des ténèbres à la lumière

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