La chose la plus importante – et la plus intéressante à dire concernant le chemin Sénestre que j’ai suivi pendant plus de trente ans est qu’il nous enseigne et nous permet de vivre notre vie à un niveau supérieur, différent. Autrement dit, d’exulter dans la vie elle-même : une vie sénestre se dévoile dans l’intensité, là où, dans le monde, il y a de l’action et une volonté obstinément tournée vers l’accomplissement d’un but – n’importe lequel ; elle est un désir d’expérimenter, de s’instruire, de partir en quête ; elle réside dans la détermination arrogante de ne pas accepter les normes, les réponses, les limites fixées par d’autres.

Rien n’est trop dangereux pour nous ; rien n’est interdit. Nous nous appliquons à nous tester nous-mêmes et à apprendre.

L’envie de pousser son corps à ses limites – et au-delà – ; de tester son endurance et d’aller encore au-delà pour atteindre ce merveilleux sentiment de bonheur, au bord de l’épuisement, lorsqu’un but a été atteint, lorsque l’on a ressenti – été – cette exquise harmonie de l’esprit, du corps et de la personnalité permise par la concentration absolue sur l’objet de son effort.

L’acceptation de défis – en particulier lancés à nous-mêmes. Et si nous n’avons pas de défis à relever nous en lancer ou en inventer.

Ce sont des moments – des jours, des semaines – de volupté ; ce sont des moments de désir exquis ; des moments de joie sublime ; des moments – des jours, des semaines – d’exultation ; et pourtant une véritable vie Sénestre est également celle qui comporte des moments, des jours, d’une tristesse ineffable ; parce qu’on a vu, connu, compris, et parce que l’on ressent davantage que la plupart des gens. En raison d’une symbiose avec ce qui doit être connu pour être vraiment compris ; une symbiose que de simples mortels trouveraient étrange. Et c’est notre volonté qui unit les opposés et nous permet même de les transcender.

Ce qui doit être intégré par ceux qui s’aventurent sur le chemin Sénestre est que nous pouvons être tellement plus que nous ne le pensons : nous avons tellement de potentiel, physique, intellectuel ; psychique ; magique ; créatif.

Nous qui suivons la voie sénestre, nous nous efforçons de faire de notre vie entière un acte de magie ; nous devenons la magie ; nous sommes la magie. Toute vraie magie est une intimation de ce que nous pouvons être : de ce qui nous attend dans la prochaine phase de notre évolution. Il n’y a rien de compliqué dans notre Voie, le sombre chemin que nous avons choisi ; il ne comporte, en vérité, aucun secret.

Comment – reconnaître ceux qui foulent le véritable chemin Sénestre ? Cela se voit dans leurs yeux ; même dans leur façon de marcher. Il y a quelque chose de légèrement dangereux qui émane d’eux. Quelque chose que les simples mortels trouvent légèrement inquiétant ; quelque chose qu’ils ne peuvent pas tout à fait « résoudre » ni expliquer.

Ceux qui foulent ce chemin sont forts, mais l’ampleur de cette force est la plupart du temps dissimulée, bien que beaucoup de gens puissent la sentir d’une certaine façon. Et quel est le but ultime d’une vie sénestre ? Mourir en essayant de transcender : continuer à être en quête, même à la toute fin.

« The Joy of the Sinister ». Order of Nine Angles 114yf. Traduction française par Melmothia & Anonyme, 2015.