Les 10 Ecorces dans le Pardes Rimonim | Rat Holes

Les 10 Ecorces dans le Pardes Rimonim

Moïse Cordovero, connu aussi sous le surnom de Ramaq, naquit à Safed en Israël, en 1522, dans une famille d’origine espagnole. Ayant étudié le Talmud dès son plus jeune âge, Moïse Cordovero se passionne bientôt pour l’étude du Zohar, sous la direction de plusieurs maîtres. Vers 1550, il fonde une académie d’études kabbalistiques à Safed, qu’il dirigera jusqu’à sa mort, en 1570.

Moïse Cordovero a laissé une oeuvre immense. Ses ouvrages les plus connus sont Or Yakar (Lumière précieuse), un commentaire du Zohar en seize volumes, et le Pardes Rimonim / le Livre du Jardin de Grenades, achevé en 1548. Ce dernier est une véritable somme encyclopédique qui aborde tous les grands thèmes de la kabbale et s’applique à synthétiser et concilier les systèmes de pensée kabbalistique. Achevé en 1548, cet ouvrage est composé de trente-deux Portes / Sections (suivant le nombre des sentiers de la sagesse), divisées elles-mêmes en chapitres.

L’intitulé de l’ouvrage s’explique par une anecdote elle-même rapportée dans ce traité : il est dit que quatre rabbins pénétrèrent dans le jardin de la connaissance, mais que le premier mourut, le second devint fou, le troisième renia sa foi et qu’un seul en ressortit sain et sauf. Cette légende s’explique par les quatre niveaux d’interprétation que la kabbale prête aux textes bibliques. Ces quatre niveaux ont été symbolisés au Moyen Âge par le mot pardès, פרדס, signifiant « jardin, verger », la première lettre, le Peh, étant associée au mot hébreu Pchat qui signifie « sens littéral » ; la seconde à Remez, le « sens allégorique » ; la troisième au Derash, le « sens symbolique » analogique ; et enfin la quatrième au Sod, le « secret initiatique ».

Si l’ouvrage évoque régulièrement les qlippoth, les deux sections qui leur sont entièrement consacrées sont la « Section sur les Permutations » et « Le Palais des Ecorces ».

Nous avons utilisé ici la version bilingue hébreu-français, en 4 volumes, traduite par Raphael ben Avraham en 2011. Lorsque cela nous a semblé utile, nous avons ajouté l’hébreu dans le texte. Concernant les translittérations, nous avons conservées celles du traducteur.

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La nature des Écorces

La « Section sur les Permutations » s’ouvre sur la question de l’origine des Écorces, autrement dit de l’origine du Mal. L’auteur écrit :

« comme il existe un côté de Sainteté, de pureté, de charité, de droiture et de bien, de même il existe un côté d’Écorce qui correspond à l’impureté et à l’oppression, car il s’agit de l’accusation, et c’est de ce côté que se trouvent les Accusateurs et ceux qui font dévier l’homme de ce qui est droit vers ce qui n’est pas le bien ».

Sont alors livrées plusieurs considérations concurrentes et complémentaires : les Ecorces correspondent à une descente, inhérente à un alourdissement vers la matière et au péché originel ; elles sont comme des « excréments », c’est-à-dire ce qui rejeté une fois la nourriture digérée :

« Il n’existe rien de mauvais qui puisse descendre des Cieux, car en haut se trouvent des choses infiniment fines. En vérité, c’est lors de l’épaississement des choses et de leur descente via les degrés émanés qu’une chose se sépare en ce qui est mangeable au sein même de ce qui est mangé et qu’apparaissent les déchets » ; les Écorces sont également un « excédent ».

Il est dit que lors de la Création, l’homme fut d’abord une semence, c’est-à-dire de la Lumière, puis que se propageant, cette Lumière est devenue de l’Eau, puis un Firmament (autrement dit une image et une forme étant désormais fixées). Une foi ce Firmament purifié et nettoyé, il demeura une humidité :

« Et ce sont les Eaux mauvaises et troubles à partir desquelles apparaissent les déchets qui accusent tout le monde, mâle et femelle ».

Il est ajouté que les Écorces se nourrissent de l’excédent du Shefâ (la lumière divine).

Plus loin dans le texte, Cordovero justifie l’existence des Ecorces par le libre arbitre :

« Nous devons expliquer l’utilité de cette Ecorce et sa relation avec ce monde, car dire qu’elle sert à punir ne suffit pas. Car si nous posons la question suivante : Toute l’essence du châtiment n’est-il pas causé par le mauvais penchant et par l’Écorce ? […] Nous dirons que leur création fut voulue par le Créateur pour les besoins du monde et des créatures […] Et s’il n’y avait que des anges sans libre arbitre dans leurs actes, le monde serait sans récompense pour ses actes, car ils seraient obligés comme dans le cas des Anges. C’est pourquoi il est indiqué que l’homme est doté de libre arbitre et qu’il oscille entre le mauvais penchant et le bon penchant ».

L’Écorce est donc là pour mettre l’homme à l’épreuve et lui permettre de choisir le bien plutôt que le mal, les deux forces tirant chacune de leur côté. Il également dit que l’homme oscille entre le Jugement (Gevura) et la Miséricorde (H’esed) et que l’Écorce se situe du côté du Jugement qui lui fournit sa nourriture.

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Les 10 Écorces

Le chapitre IV de la même section nous dit que les Écorces possèdent 10 Sefiroth et 7 Palais, tout comme la Sainteté, « car elles font face à la sainteté comme un singe face à un homme ». Il existe ainsi pour chaque objet et qualité, son pendant impur. Et chaque Écorce, comme chaque Sainteté, possède un nom.

La première Écorce se nomme Te’omiel : תאומיא׳׳ל, un terme venant de Te’omim qui signifie « jumeaux », ce que Cordovero explique par : l’esclave qui règne et supplante son maître, agissant à son égard comme un jumeau. Il ajoute que certains écrivent ce nom sans aleph, Tomi’el, en référence à la racine Tom qui signifie « la fin » (תום) : « Et le sens est que tout cela vient achever la Sainteté, la diminuer et la diriger ».

Selon le Rashbi (Simeon bar Yochai), ces deux Écorces, Te’omiel et Tomiel font face aux sefiroth Netsa’h et Hod.

La première Ecorce est parfois également appelée Ketheriel (de kether, la couronne) ou Karethiel (de kareth, le retranchement) ou encore Qamatiel (de qamat, plier) en référence à : « Tu planteras des générations qui plieront et seront retranchées avant leur temps ».

La seconde Écorce est appelée Ughiel : עוגיא׳׳ל, du terme Ugha signifiant « cercle », car « elle retient le shefâ et empêche la Providence, tout comme un rideau sépare Israël de ses pères qui se trouvent dans les Cieux ».

D’autres la nomment Goîel (de Gaâ, meugler) ou font dériver son nom du terme Gewiâ qui signifie « l’agonie ». Le Rashbi dit qu’elle fait face à la sefirah H’okhma, parfois appelée « l’homme » et nomme donc cette Ecorce « l’homme perfide ».

D’autres enfin appellent cette qlippah Beli’el ce qui signifie « sans Dieu ».

La troisième Écorce se nomme Sathariel, סתריא׳׳ל, de la racine sathar qui signifie « cacher », car « elle dissimule les faces de la Miséricorde ». Mais ce terme signifie également « détruire ».

D’autres l’ont appelée Harsiel (de haras, détruire). Elle fait face à la sefirah Bina « car Bina instaure et révèle l’édifice de la Divinité et donc construit l’Édifice de la Sainteté, alors que la première dissimule et détruit l’Édifice ».

D’autres encore l’ont appelée Seâriel (de seâr, fourrure), car « c’est d’elle que provient l’homme poilu ainsi que le poil de la nudité de la femme », ou Ittiel (préposé).

La quatrième Écorce est appelée Gaâsh Kale : כלה געש, qui signifie « tumulte éphémère ». Selon le Ramban (Moshe ben Nahman), elle gouverne la jalousie.

Le Rashbi la nomme Uziel (de oz, force) et c’est de là que proviennent les anges déchus Uzza et Aza’el. Elle est également appelée H’azariel (de h’azar, revenir et h’azir, porc). D’autres encore l’appellent Samma’el (de sam, poisson), mais ce nom est aussi attribué à une autre Écorce.

La cinquième Écorce est appelée Golhav : בגולה׳׳, ce nom venant peut-être de Gav Lahav, « à l’intérieur, une flamme » : « Et le sens en est qu’elle est un corps de flammes, car c’est à partir de là que commencent les corps qui recouvrent les fils des hommes et son trône est entouré de flammes ardentes ».

D’autres lui donnent le nom de Zaâfiel (de zaâf, tempête) car c’est le Prince de la Tempête. Le Rashbi la nomme Agagiel, qui provient d’Agag, roi d’Amaleq.

La sixième Écorce est appelée Tagrinon : תגרינו׳׳ן, de tiggar, signifiant « querelle », car elle cause la querelle et le trouble au son d’une grande clameur.

D’autres la nomment Zaâmiel (de zaâm, colère), car il peut s’agir du Prince de la colère. Le Rashbi l’appelle Oghiel, afin de recevoir le Pilier central et de là vient Og, roi de Basan.

La septième Écorce est appelée Orevzareq : ערבור׳׳ק, pouvant s’interpréter comme « corbeau qui répand », car elle est comme un corbeau cruel prêt à répandre ses rejetons. Lorsqu’elle reçoit du shefâ, elle le transforme et le répand.

D’autres la nomment Qatsfiel (de qetsef, fureur) et disent qu’elle est le Prince de la fureur.

La huitième Écorce est Samma’el : סמא׳׳ל. Mais selon le Rashbi, les septième et huitième Écorces sont Te’omiel et Tomiel, dont les noms sont proches de tehomoth, les abîmes.

D’autres nomment cette Ecorce Ragzhiel (de roghez, colère) et disent qu’il s’agit du Prince de la colère.

La neuvième Écorce est appelée Gamliel : גמליא׳׳ל (de la racine gamal, la récompense) et Nah’ashiel : נחשיא׳׳ל (de la racine Nah’ash, serpent), car il est dit que « lorsqu’elle se nourrit du côté de la pureté, elle est appelée Gamliel et ses légions sont des légions de paix apparaissant aux fils de l’homme sous la forme d’un homme pour leur annoncer l’avenir. Mais lorsqu’elle se nourrit de l’Écorce, elle est appelée Nah’ashiel, c’est-à-dire que le serpent devient sa divinité et sa force ».

D’autres l’ont appelée Avriel (de avar, transgresser, pécher) et supposent qu’il s’agit du Prince du péché. Pour le Rashbi, elle est Samma’el l’incirconcis.

La dixième Ecorce est Lilith : לילית, de Layil, « la nuit ». Elle est surnommée « femme prostituée » et elle reçoit toutes les Écorces. D’autres appellent cette écorce : « Celui qui interroge les morts ».

Synthèse réalisée par Melmothia (2015), à partir de l’ouvrage Sefer Pardes Rimonim – Livre du Jardin de Grenades (4 tomes), par Rabbi Moïse Cordovero, traduction française par Rafael ben Avraham, Lulu, 2011.

2 commentaires sur “Les 10 Ecorces dans le Pardes Rimonim”

  1. Je cherche le livre « Pardes Rimonim » de Cordovero en traduction française, sauriez vous me dire ou je pourrais le trouver, j’ai vu qu’il existe en anglais, mais pas de français.
    Je suis tellement désolé de pas le trouver.

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